samedi 9 août 2014

Ukraine: La manufacture occidentale III


Ukraine: La manufacture occidentale; l'exemple de Danilo et Marta

III 
L'origine du choix des USA, et la formation d'élite

I Le choix de Danilo par les occidentaux
II Danilo dans les médias, universités et églises
III L'origine du choix des USA, et la formation d'élite
IV L'idéologie de Danilo


Cette partie est un peu plus décousue, après avoir parlé des exportateurs de démocratie, des médias, de l'église, et un peu d'éducation scolaire, je fais une parenthèse sur le travail de Danilo qui est à sens unique qu'il soit journalistique, historique, religieux ou "démocratique". Vu la longueur du CV et le nombre d'ouvrage du monsieur, notons juste que tous ces ouvrages ont comme point commun le détachement de l'Ukraine de la Russie mais que parler de tous revient à écrire une encyclopédie.. je vais essayer de montrer une vue d'ensemble en commençant par un personnage sur lequel Danilo a fait un film à la demande de l'ambassade des États-Unis.


Arnold Margolin:
J'ai donc choisi de parler d'Arnold Margolin qui sera peut-être moins traité par les journalistes ou autres amis blogueurs que les autres "héros ukrainiens", Ce personnage aura des choses à nous apprendre. Le documentaire de Danilo sur Arnold Margolin fut une commande de l'ambassade des USA en Ukraine. (Marta, sa femme, écrivit et produisit un autre documentaire où Danilo participa, sur le patriarche greco-catholic Josif Slipyj).
Arnold Margolin
Arnold Margolin est un célèbre avocat juif qui plaida au procès Beiliss, il fut aussi l'un des fondateurs du Jewish Territorial Organisation et avait d'abord pour ambition de négocier avec l'empire tsariste avant de rejoindre le mouvement sioniste. Il se réjouit de la fin de l'Empire tsariste, puis après le coup d'état bolchévique, dans la République d'Ukraine, les pogroms ne s'étaient pas arrêtés, il se rendit alors compte qu'il n'était pas possible de négocier avec les rouges.. Il fut membre de la délégation "ukrainienne" à la conférence pour la paix à Versailles après la première guerre mondiale puis immigra aux États-Unis en 1922, où il œuvra à la reconnaissance de la diaspora ukrainienne en tant que citoyen américain. Il était d'ailleurs très tôt devenu un citoyen américain zélé et ne retenait pas ses efforts pour continuellement produire des rapports informels au Département d’État en matière de politique étrangère de 1933 à 1943.
Pendant la seconde guerre mondiale, il collabora avec l'OSS qui a rapidement compris, notamment et on peut penser que le travail de Margolin n'y est pas pour rien, que, comme l'ont fait les nazis, il fallait utiliser les communautés ethniques étrangères afin d'influencer la politique dans leurs pays d'origines pour les intérêts américains et pour cela créa le FNB: "The Foreign Nationalities Branch of the Office of Strategic Services (OSS) was the only agency of the U.S. Government that focuset its attention in a comprehensive way on foreign nationals and ethnic groups in the U.S. during World War II.
The Department of Justice was concerned with potentially subversive aliens and other Federal agencies gathered at least some domestic political intelligence, but only the Foreign Nationalities
Branch (FNB) developed an extensive network of contacts and systematically collected information among foreign nationality groups in the U.S. to enable our government to understand, anticipate, and influence political developments in Europe."

Pour l'essentiel on comprend que la branche FNB de l'OSS est là pour créer des réseaux pouvant influencer les développements politiques en Europe pour le mieux des intérêts américains. En somme de la belle ingérence comme ses héritiers aujourd'hui (NED, IRI, Freedom House, Usaid, IRF, Pauci, Opora, UE, etc....). 
Ensuite Arnold officia en Allemagne à l'Army’s European Command Intelligence School for Army Officers en 48-49. Il était donc naturellement proche des milieux de la CIA après la guerre. Ici on voit qu'il a envoyé son dernier livre au directeur de la CIA d'alors, Walter B Smith.

Notons tout de même de Margolin que, dès 1933 il dit que l'Allemagne n'avait aucun désir de libérer l'Ukraine et qu'avec la Pologne elles deviendraient des colonies allemandes. Il fut attristé du décès de Melnik qu'il considérait comme quelqu'un de brillant comparé à Bandera par exemple qui n'avait aucune considération pour les voix légales.
Arnold a été proposé pour être directeur de la radio Voice of America Ukraine. Rappelons ici  la note secrète qui nous dit bien que Voice of America, tout comme Radio Free Europe vu dans l'article 1 de la série, servent aussi à envoyer des messages codés aux agents de la CIA. Mais il ne fut pas pris sur conseil de l'ultra-nationaliste ukrainien réfugié aux USA après 1945 Mykola Lebed. Lebed s'appuie sur le fait que Margolin est juif et a plus de 70 ans. Il craint à ce moment que les juifs américains aient trop de griefs contre les nationalistes ukrainiens après la seconde guerre mondiale et que Margolin subisse des pressions de ceux-ci. Margolin ne fut pas directeur de VoA, ainsi le département américain suivi les conseils de Lebed. Cela montre bien que dès l'après-guerre (en réalité même avant) on entendait du côté américain s'appuyer en Ukraine comme d'ailleurs dans le reste de l'Europe sur les mêmes groupes sur lesquels s'était déjà appuyé l'Allemagne nazi pour ses conquêtes et on l'a fait comme aujourd'hui prouvé par les archives avec Mykola Lebed notamment connu pour ses crimes de guerre.
Retenons maintenant surtout cette idée qui sera reprise par Danilo, à savoir que l'Ukraine a, selon Mazepa et en accord avec Margolin, (page 232-234)  un niveau culturel moyen supérieur à celui polonais ou russe, mais manque d'une élite. Il était réellement convaincu que l'homme ukrainien est un meilleur père de famille, et agriculteur que l'homme russe ou polonais, il ne reste qu'à lui construire une élite.

La construction d'élite c'est le fil conducteur entre tous les personnages de cette série, c'est le but de la diaspora ukrainienne à l'étranger depuis des décennies, celui des nationalistes ukrainiens et depuis l'après seconde guerre mondiale celui des États-Unis. Ainsi à la chute de l'URSS, les USA se sont engouffrés dans les pays avec des plans ambitieux (fin de l'article1) pour tout refaire à leur manière, université, économie, médias, afin d'américaniser ces gens. Et pour cela la construction d'élites acquises à sa cause, notamment par les outils vus dans les deux premiers articles de la série, est un des vecteurs très important. Les USA utilisent le même stratagème que partout ailleurs et il n'est donc pas étonnant de voir se mettre en place aussi en Ukraine les campagnes de youngleader:

Programme de Young Leader:
Danilo en visite surprise à la pause pizza
Intervention de Danilo aux YL2005
Pour assoir encore plus son influence, les États-Unis ont des programmes de Young leader tout comme il en existe en France, il en existe en Ukraine. Il appartient à l'USUF (US-Ukraine Fondation) de les gérer. On peut noter que Danilo Janevski est un intervenant régulier dans ces programmes, comme ici en 2006, et que lorsqu'il n'est pas prévu, en 2005, il se permet de faire des petites visites surprises afin de faire profiter de son expérience de journaliste. De l'éthique qu'il faut avoir dans son métier par exemple comme couper une intervenante qui ne veut que demeurer professionnelle! Ces enfants seront bien sur impressionnés de rencontrer Monsieur l'Ambassadeur dans sa résidence ou le président du centre de jeunesse de l'Atlantic council ou tout autre président de USAID, de IREX, des Muskies. Ils pourront aussi découvrir  toutes les institutions mise en place par leurs parrains pour qu'ils deviennent  la nouvelle élite et guide la génération héroïque qui apporte la démocratie. Et comment ne pas se sentir fort en voyant les moyens considérables fournis et tout ce que cela représente !  J'oubliais, le directeur du programme Young Leader à Kiev, le Comunity partnership project director à Kiev est ... Marta Kolomayets.

La femme de Danilo:
Je vais essayer de condenser un peu le CV de Marta Kolomayets ici et de rappeler ce que j'écrivais en fil rouge au fur et à mesure des paragraphes de la série en ajoutant quelques faits et remarques. Concernant Marta, on peut noter qu'elle raconte avec légèreté sa première visite en Ukraine avant la chute de l'URSS où elle est allée interviewer des dissidents communistes, elle s'étonne que le KGB l'ait prise pour un agent de la CIA. On note aussi qu'elle fait parti des enfants de la diaspora de Chicago et qu'elle connaissait naturellement Katerina Chumachenko de longue date avant qu'elle ne soit première dame d'Ukraine. On note alors un parallèle assez frappant, entre ses deux personnes outre ceux évoqué déjà dans l'article, deux femmes issues de la diaspora ukrainienne en Amérique arrivent juste après la chute de l'URSS en Ukraine, se trouvent des maris qui feront de grosses carrières et qui servent énormément aux intérêts américains.
Si vous n'avez pas vu le film Ghost-writer, il y apparait un modus operandi des services américains où il est facile de trouver des similitudes avec nos deux couples ici présentés.
Marta, discours aux fulbrighters 2013 à Kiev Mohyla
Katerina, issue des rangs nationalistes de la diaspora ukrainienne faisait partie du gouvernement américain lorsqu'elle vint en Ukraine (et je passe sur ses amis, ancien ou néo, nazis). Elle créa l'US Ukraine Fondation - USUF, dont Marta quelques années plus tard devint directrice, et tandis que la première est resident advisor au service du programme bancaire de USAID, la deuxième fut impliquée dans de nombreux programmes de USAID, dont le très important UMREP incluant privatisations, médias, stratégie, économie, anti-corruption, société civile et en est responsable de l'information. Et alors que Katerina devenait première dame d'Ukraine, Marta allait être plus tard la directrice pour l'Ukraine de la NDI. Si l'on note une différence entre les deux c'est que Marta est restée américaine et Katerina est devenue ukrainienne. Marta est aussi devenue très récemment la directrice du programme fulbright pour l'Ukraine mais avant cela s'occupait du programme des Young Leader par le biais de l'USUF, avec toujours les mêmes sponsors, ou ici encore se mélangent toutes les parties citées dans l'article. Pour compléter le tableau, avec son ami américain le prêtre Gudziac, recteur de l'Université Catholique d'Ukraine, elle est directrice à l'UCEF.



Le dernier article traitera de la manière de penser de Danilo..

Gigi Houille

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